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Brésil : ce qui attend Lula


Lula a été investi président du Brésil le 1er janvier 2023. Les défis auxquels il fait face sont immenses sur les plans politique, économique et social, mais aussi sur les volets écologique et international. Thomás Zicman de Barros, Brésilien et chercheur au Cevipof (1), nous en explique les enjeux.

Thomás Zicman de Barros
D.R.

Fil Bleu. Quels défis politiques attendent Lula ?

Thomás Zicman de Barros. Le défi majeur de Lula en ce moment (2) est de construire une majorité parlementaire. Il faudra toute l’habileté de l’ancien syndicaliste pour y parvenir avec un parlement très fragmenté. C’est la condition pour vaincre le bolsonarisme qui a tout de même obtenu 49 % à la présidentielle. Pour l’instant, il a nommé une équipe de transition qui prévoit d’augmenter rapidement les prestations sociales des 30 millions de pauvres du pays comme il l’a promis pendant la campagne électorale. Le marché du travail, flexibilisé à outrance par Bolsonaro, devrait aussi faire l’objet d’une renégociation avec les syndicats.

Et sur le plan économique ?

La réussite du mandat de Lula dépend beaucoup de la bonne santé de l’économie. À ce jour, il est difficile de dire ce qu’il mettra en place pour l’économie. Il a dans son équipe des économistes et des libéraux favorables à une relance mais aussi des gens qui penchent pour l’austérité. Il a annoncé vouloir rétablir le rôle des banques publiques dans les investissements publics et privés. On verra lorsqu’il présentera son gouvernement.

Qu’a-t-il prévu sur le volet environnement ?

Il y a vingt ans, lorsque Lula était au pouvoir, la déforestation a chuté de 80 %. Avec Bolsonaro, elle a explosé. Il a absous les amendes des entreprises de déforestation pour un montant équivalent à près de 3 milliards d’euros et leur a facilité l’exploitation des zones protégées. Il a aussi démantelé tous les organismes de contrôle et de protection de l’environnement. Le programme de Lula prévoit une série de mesures intitulées « Déforestation zéro » comprenant la révocation de décisions de son prédécesseur. Il devrait aussi créer un secrétariat interministériel climatique capable d’intervenir dans tous les secteurs.

Peut-on s’attendre à un retour du Brésil sur la scène internationale ?

Oui. On l’a vu avec l’intervention de Lula à la COP 27 alors qu’il n’était pas encore investi tandis que Bolsonaro avait refusé d’accueillir la COP précédente. Sur les questions environnementales, il va tenter de rétablir le leadership du Brésil avec le Congo et l’Indonésie, avec lesquels un partenariat pour la préservation des forêts a été signé. Ces trois pays représentent la moitié des ressources forestières de la planète. D’une manière générale avec Lula, le Brésil devrait retrouver un rôle important sur la scène internationale avec une position traditionnellement indépendante et en relançant les grandes coopérations comme l’Unasur (Union des nations sud-américaines), le Mercosur (le marché commun de l’Amérique du Sud), les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) mais aussi les coopérations Sud-Sud avec les pays africains.

Propos recueillis par Didier Blain

(1) Cevipof, le centre de recherches politiques de Sciences Po.
(2) Interview réalisée à la mi-novembre 2022.

Lula et la CFDT

Depuis les années 1980 et la création de la CUT, le principal syndicat du Brésil, la CFDT soutient Lula qui a créé cette organisation avant de se lancer en politique avec le Parti des travailleurs (PT) et de devenir président du Brésil (2003-2010). La CFDT, via son secteur international de l’époque, a apporté un grand soutien politique, financier et en termes de formation aux initiateurs de la CUT. Aujourd’hui encore, les deux organisations entretiennent d’étroites relations, comme en témoigne la visite d’une délégation menée par Laurent Berger en 2015. À cette occasion, Lula avait reçu la délégation sur le site de sa fondation à São Paulo (photo ci-dessous).

Lula et Laurent Berger
Didier Blain